samedi 10 septembre 2011

Communiqué du MRAP

11 septembre 2001-11 septembre 2011 : 10 ans de guerres et le monde n’est pas plus sûr


Le MRAP avait condamné sans appel les terribles attentats du 11 septembre 2001 et affirmé que seules des actions durables, destinées à s’attaquer aux causes du terrorisme, seraient de nature à faire reculer ce fléau. Les dix années écoulées confirment hélas nos analyses .

Dix ans après, le bilan est affligeant : deux guerres aux conséquences incalculables, la militarisation des rapports internationaux, l’exacerbation du racisme à l’encontre des populations arabes et musulmanes, les violations répétées du droit international et du droit des peuples, les restrictions sans précédent des libertés individuelles conséquentes à l’obsession sécuritaire et le discrédit jeté sur l’ONU.

La guerre en Afghanistan, menée sous le commandement des États-Unis, avec l’aval des Nations Unies,  loin d’avoir fait progresser les droits des Afghans et régresser le terrorisme, a nourri les haines et attisé les tensions. Les destructions, les morts par milliers, les réfugiés par dizaines de milliers, la misère, la négation des droits des Afghans - et notamment des femmes - nourrissent l’engrenage de la violence et de la guerre. Les raids incessants au Pakistan déstabilisent dangereusement toute la région. Les troupes françaises qui participent à cette guerre, alors que les sondages prouvent que la majorité des Français y est opposée, ont payé un lourd tribu dans une guerre dévastatrice : 73 morts dont 21 en 2011.

Les Etats Unis et leurs alliés ont contribué à un état de guerre permanente par la mise en œuvre du concept de « guerre préventive » qui, en réalité, se révèle être une forme moderne de colonisation. Au XVIIème siècle on « évangélisait », au XIXème siècle on « apportait la civilisation ». Aujourd’hui « on apporte la  démocratie » : mais où est la démocratie en Afghanistan ? En Irak ?... Les objectifs avoués changent, les objectifs réels demeurent : le contrôle et l’appropriation des ressources naturelles d’un pays par une puissance étrangère. Dans le même temps, la colonisation et l’occupation de la Palestine se poursuivent sans que des sanctions soient prises à l’égard de l’Etat israélien.

La théorie, aux dégâts incalculables, du “choc des civilisations” a été le détonateur qui a permis la libération de la parole et le développement d’actes racistes contre les Musulmans à travers le monde. La hantise du fondamentalisme musulman a pris des dimensions irrationnelles au point de faire considérer tout musulman comme un terroriste potentiel. L’équation musulman=intégrisme=terroriste - violence entretenue, instrumentalisée - a participé à structurer la musulmanophobie.

Les répercussions de cette idéologie, entretenue partout à des fins politiques par les extrêmes droites  et, en France, par une partie extrême de la droite qu’est la « droite populaire », ont contaminé l’ensemble des sociétés et les rapports sociaux. Elles ont conduit à la terrible tragédie d’Oslo. Les problèmes politiques, économiques, sociaux, d’environnement…tendent à disparaître au profit d’une lecture ethnico-religieuse des relations entre les peuples dont se nourrissent tous les communautarismes et tous les extrémistes.

Sur le terrain des libertés individuelles, les Etats-Unis - mais aussi les autres puissances occidentales, alliés ou non, comme la France ou la Russie - se sont servis du 11 septembre pour développer des logiques sécuritaires qui portent atteinte aux libertés individuelles, engendrent des législations d’exception, font renaître des discours légitimant la pratique de la torture ; Guantanamo qui n’est toujours pas fermé, malgré les promesses d’Obama, étant le symbole de ce “non droit”.

La politique atlantiste de Nicolas Sarkozy entraîne la France dans cette spirale de la violence.

L’Organisation des Nations Unies, créée dans l’objectif initial de favoriser le règlement pacifique des conflits entre Etats, est plus que jamais l’otage des puissances militaires et économiques qui portent ainsi atteinte à sa crédibilité.

Les révoltes dans les pays arabes prouvent que les peuples n’acceptent plus ce qu’on leur impose : elles sont un démenti cinglant à ce concept de « guerres de civilisation ».

A l’encontre des logiques de guerre et de cette propagande pernicieuse, le MRAP considère que seul le respect du droit international, la garantie des droits humains et du droit des peuples pourront dégager les voies et les moyens de la paix et de la sécurité. 

Le MRAP réitère ce qu’il disait il y a 10 ans : la guerre contre le terrorisme n’est gagnable par personne, c’est aux causes qu’il faut s’attaquer. Contre la « guerre des civilisations » qui conduit le monde à une catastrophe irrémédiable il est urgent d’agir pour un monde de justice, de paix et de démocratie, une démocratie conquise par les peuples et non imposée de l’extérieur.

Paris, le 9 septembre 2011.